Interview
Laurence BILLARD

Aujourd’hui, nous devons trouver le bon maillon décisionnel pour appréhender une nouvelle pédagogie.

Laurence BILLARD

Date de l'entrevue : 16/01/2021

Dans un premier temps, je vous propose de vous présenter, de nous parler de votre parcours professionnel 

J’ai été recrutée à l’IUT2 en 2000 sur un poste d’enseignant-chercheur en gestion au sein du département GEA de Grenoble. Dès la première année, je me suis investie dans la création et le pilotage de formations : avec la première licence professionnelle de l’UPMF, qui a cette époque ne concernait que des salariés, en 2004 pour la licence professionnelle Management des collectivités territoriales, ou encore plus récemment avec la licence générale d’adjoint de direction PME-PMI.
Au contact d’entrepreneurs dans mon environnement personnel, mais également en tant qu’élue de collectivités locales et administratrice d’établissements publics locaux, j’ai toujours veillé à ce que nos formations soient en adéquation avec les besoins des entreprises et du territoire. Ainsi, je donne beaucoup de sens à la démarche compétences, déployée dès 2013 au sein de l’IUT, car elle permet aux étudiants de bien positionner leurs apprentissages par rapport aux attentes des employeurs.
Ces sept dernières années, en tant que Directrice adjointe de l’IUT, je suis montée en compétences sur les dispositifs de formation continue et d’apprentissage. Ces années ont été marquées par le développement de l’alternance au sein de la presque totalité de nos formations et le développement de partenariats institutionnels avec des branches professionnelles. Mon parcours universitaire et extraprofessionnel me permet d’être une interlocutrice facilitatrice dans les échanges entre les entreprises partenaires et l’IUT.
À l’instar de mes prédécesseurs, je n’ai pas été cheffe de département avant d’accéder à la fonction de Directrice. J’ai en revanche une bonne connaissance de l’institution et de ses rouages. J’ai eu plaisir à travailler avec tous les services et départements ces dernières années et c’est avec confiance et humilité que je m’installe dans mes nouvelles fonctions.

Vous arriverez en milieu d’année universitaire, quels seront vos premiers chantiers ?


Un premier chantier stratégique s’impose naturellement avec la construction de la nouvelle offre de formation orientée compétences, que ce soit avec la mise en place du BUT, ou la nouvelle accréditation des licences professionnelles. Toutes nos formations sont amenées à être repensées pour la rentrée 2021.
Ces deux projets, dans lesquels nous sommes tous investis, enseignants, administratifs, vont nous amener à repenser nos modes de fonctionnement, notre organisation administrative et pédagogique. Passer du DUT à bac +2 au BUT, nouveau cursus à bac+3, est un gros chantier. En parallèle, il me faut prendre rapidement la suite de mon prédécesseur, Lionel Filippi, sur tous les dossiers stratégiques et opérationnels de l’IUT2, et ils sont nombreux !

Vous entamez votre mandat en pleine crise sanitaire, quelles sont les plus grandes difficultés rencontrées par les enseignants et les étudiants en cette période de crise ?

Ce qui est compliqué en ce moment, c’est la perte de repères que l’on observe aussi bien chez les étudiants que les personnels enseignants et administratifs. Les résultats du premier semestre ne sont pas à la hauteur des efforts déployés par les enseignants. Nos étudiants sont en détresse et cela joue aussi sur notre moral.
Aujourd’hui, nous devons trouver le bon maillon décisionnel pour appréhender une nouvelle pédagogie. Les réponses au premier confinement ont été individuelles et institutionnelles : chaque enseignant à réinventé sa pédagogie, chaque composante a veillé à réduire la fracture numérique en équipant étudiants et enseignants. Nous allons dorénavant accorder une importance plus forte à l’organisation collective de la formation pour qu’elle devienne « etu-responsable » en limitant le temps passé sur les écrans, en régulant la charge de travail et en privilégiant les interactions collectives. Sur le papier, les idées fusent, mais la déclinaison opérationnelle de cette organisation est un vrai casse-tête lorsque l’on a 3200 étudiants et des injonctions, qui à peine intégrées sont déjà obsolètes !

Le Club des Entreprises de Grenoble a pour vocation de faciliter la mise en relation et les échanges entre les enseignants, étudiants et les managers des entreprises partenaires. Qu’attendez-vous de ces échanges entre le monde des IUT et les entreprises du territoire ?


Nous avons plus que jamais besoin d’échanger régulièrement avec les entreprises au sein de nos comités de perfectionnement, mais aussi de manière informelle dans la mise en œuvre de notre nouvelle offre de formation. Chaque échange entre un enseignant et un socioprofessionnel est source de progrès.
Nos étudiants également attendent « la bonne parole » des entreprises. Nous les amenons à travailler leur projet professionnel en prenant appui sur la méthodologie d’accompagnement élaborée par le Centre de Compétences et des Métiers et les enseignants. Nos étudiants essaient de se projeter dans le monde professionnel et apprennent à construire leur propre stratégie de professionnalisation. Lorsqu’ils se sentent prêts, ils ont besoin d’échanger « avec leurs pairs », l’IUT doit alors passer le relai et nous avons besoin d’interlocuteurs comme les adhérents du Club, par exemple.
Sur du très court terme, nos étudiants ont besoin d’être rassurés sur leur employabilité. Ils craignent de ne pas trouver de stage, d’alternance, d’emplois dans ce contexte sanitaire et d’être définitivement marqués comme la génération Covid. Nous devons ensemble leur redonner confiance très rapidement en envoyant des signaux forts.

Le diplôme universitaire se transforme en Bachelor universitaire dès la rentrée 2021, qu’est-ce que cela va changer pour les entreprises habituées à travailler avec les IUT et quels en seront les avantages ?


Le BUT est un cursus de formation orienté métier qui prépare aussi bien à l’insertion professionnelle qu’à la poursuite d’études, en cela il offre les mêmes perspectives que le DUT. L’ambition de ce diplôme est de ne plus opposer les connaissances (dispensées par l’Université) des compétences (acquises en entreprise). C’est dans le cadre de projets et de mise en situation d’apprentissage que l’on évaluera comment les cours, considérés comme des ressources, sont mobilisés à bon escient dans un contexte professionnel donné. C’est assez complexe et c’est ce qui explique que les programmes de BUT ne sont pas encore terminés ! Les équipes travaillent durement. 2021 restera définitivement gravée dans les esprits.
Le BUT permettra ainsi aux entreprises partenaires et membres du Club de tisser des liens encore plus étroits et privilégiés avec les IUT.

Dans En qualité de nouvelle Présidente adjointe du Club des Entreprises de Grenoble, quels projets ambitionnez-vous pour le Club ?


Je mets beaucoup d’espoir dans le Club. Des projets ambitieux sont en cours. Ils permettront de multiplier et fluidifier les échanges entre le monde de l’entreprise et le monde étudiant. J’ai hâte de les voir aboutir. J’attends aussi d’être surprise par les initiatives du Club comme cela a été le cas avec les webinaires durant le confinement. J’ai vécu ces échanges comme une bouffée d’oxygène qui me permettait de sortir de mon quotidien !

Propos recueillis par Richard Compte.